J1 (27 avril) : Mile 0 à 20
Premier jour de marche : lever à 4h30 du matin pour petit-déjeuner et préparation finale du sac. Des trails Angels nous amènent sur le site de départ du PCT. Première photo sur la stèle nous sommes donc une vingtaine à prendre le départ ce matin tout le monde traîne un peu sur le Monument et personne n’ose partir le premier.

Finalement Mark (un chirurgien d’Alaska) et moi prenons le départ les premiers et tout le monde nous suit. L’objectif pour moi est donc le mile 20 où se trouve le lac Morena. Il est 7h30 quand nous partons et il commence déjà à faire chaud. La marche est assez facile au départ, relativement plate. Puis vient la première montée dans les rochers sans ombre avec une végétation faite de broussailles et de cactus. Je fais ma première pause vers midi, le soleil tape fort et il est difficile de trouver un coin d’ombre. Un petit écureuil vient jouer avec moi pendant que je mange.

Le début d’après-midi on redescend tout ce qui a été monté le matin pour se retrouver au fond d’un Canyon avec un petit ruisseau. Nous sommes au mile 15. J’en profite pour me reposer un petit peu à l’ombre avant d’attaquer la dernière montée de la journée qui s’étire sur 5 miles encore. Cette montée est sinueuse et très pentue en pleine chaleur. C’est difficile mais arrivé au sommet je vois le lac Morena en contrebas et il ne me reste plus qu’à descendre. Près du sommet je double un randonneur israélien qui souffre de crampes musculaires et de fatigue. Il me dit que son sac est trop lourd. Je croise aussi Laura une anglaise qui peine beaucoup à la montée. Elle est à son deuxième jour de marche. Moi aussi mes épaules commencent à me faire drôlement souffrir ainsi que tout le haut de mon dos.
Arrivée au lac Morena vers 16h30 avec une excellente surprise : ici nous attendent nos premiers trail Angels il s’agit de personnes qui viennent bénévolement sur le chemin en aide aux randonneurs, leur apporter un peu de réconfort. Dans leur cas ils ont installé un énorme grill et nous confectionnent de magnifiques hamburgers. Il y a aussi de la soupe, des oranges et des fraises. J’en profite pour prendre aussi un énorme Coca-Cola bien frais.
Je discute un moment avec un des trail Angels qui est un vieux randonneur américain. Je lui parle de mon sac qui me semble bien trop lourd et de mes épaules qui sont douloureuse. Ensembles nous déballons mon sac et trions ce qui n’est pas nécessaire et que je vais laisser ici dans une hiker box. Il s’agit d’une boîte dans laquelle on peut déposer ou prendre des affaires. J’en trouverai tout au long du PCT. Enfin je franchis des derniers mètres qui me séparent du site de camping réservé aux randonneurs et je monte ma tente. Nous sommes au bord d’un lac et c’est assez marécageux mais la vue est belle. Il y a des douches payantes mais je décide de ne pas en prendre : c’est mon petit geste de rébellion et j’ai déjà eu bien assez de luxe comme ça
J2 (28 avril) : Mile 20 à 36,7
Au lever, la tente est absolument trempée, tout est humide de rosée. Il faut donc attendre que tout sèche avant d’envisager partir. La nuit a été courte, il va falloir que je m’habitue à dormir sous la tente. Je remplie mes gourdes et part vers 8h45 en faisant un petit arrêt au Trail magic pour un café. Le sac est beaucoup plus léger qu’hier, c’est beaucoup moins douloureux et c’est un bon point. Je peaufine aussi les réglages, je serre plus la ceinture ventrale ce qui soulagé encore plus le dos.
Je suis étonné de marcher seul

Je suis étonné de marcher seul, et ce sera le cas toute la matinée. Je traverse des vallons puis ma première rivière sur un tronc d’arbre. Vers 10h00 j’attaque la montée qui va m’occuper tout le reste de la journée et va m’amener de 1000 mètres à 2000 mètres ce soir. La montée est assez progressive mais il fait très chaud (28 degrés). Je trouve une minuscule ombre pour manger et me reposer vers 13h00. En cours d’ascension, nouveau Trail magique avec de l’eau fraîche et des fruits. Je croise Kate from Colorado (ici on est tous un prénom de quelque part) qui a une énorme ampoule à un pied et se fait soigner par une Trail Angel. Elle repart comme si de rien n’était et marche presque aussi vite que moi avec sa blessure !
Vers 17h00 je tombe sur le spot parfait pour mon bivouac : au bord d’un petit ruisseau à sec et sous un arbre avec une vue magnifique et un grand soleil qui sera magnifique au coucher. Il y a 2 autres randonneuse déjà installées avec qui je discute un peu, puis dodo.
J3 (29 avril) : Mile 36,7 à 56,3
La nuit a encore été difficile mais le réveil l’est encore plus : il fait un froid de canard et une brume épaisse nous entoure. La visibilité est de 50 à 100 mètres et il y a une espèce de pluie très fine qui commence à tomber. Je remballe ma tente et commence à marcher vers 07h30 en tenue de froid (doudoune + veste de pluie + pantalon de pluie) car il fait aux alentours de 5 degrés !
Je termine les 3 derniers miles de montée puis je vais cheminer dans des sous-bois très jolis au dessus de Mont Laguna. C’est toujours très couvert et je sens je vent qui forci à la cime des pins. Ça remonte ensuite un peu pour arriver sur un haut plateau et là c’est l’horreur. Le vent forci d’un coup avec des énormes rafales à plus de 80 km/h. J’ai du mal à tenir debout. Quand le vent est derrière moi je suis obligé de courir. Quand il est de côté je titube comme un ivrogne et quand il est de face je suis obligé de me mettre en position de chute libre (la tête penchée en avant et les bras derrière le corps). Au bout de 10 minutes de lutte, la pluie arrive et vient se fracasser contre mon visage à pleine vitesse. Il fait un froid glacial, température ressentie proche de 3 ou 4 degrés. C’est assez flippant d’autant plus que je suis seul sur le plateau et je sais que ça va durer plusieurs heures d’après le topo. Je n’ai pas le choix, il faut marcher sans s’arrêter car il fait trop froid. Dès que j’essaie de m’arrêter je me mets à trembler de tout mon corps. Je vais donc continuer ainsi pendant 4 heures non-stop. Vers 13h00 un minuscule bout de soleil déchire les nuages et je m’aperçois que je suis tout en haut d’un magnifique Canyon, au bord d’une falaise avec une vue à couper le souffle. Le chemin va maintenant serpente le long de cette falaise et alterner les coteaux exposés au vent du nord-ouest et ceux protégés, ce qui me permet de petites pauses pour manger une barre énergétique et boire.
Je passe le mile 50 qui est signalé par un petit tas de pierres mais je ne m’arrête pas pour une photo car le vent reprend et la pluie aussi. J’ai mal aux yeux tellement c’est fort. Je commence à m’inquiéter pour ce soir. J’espère que la pluie va se calmer et que je vais trouver un endroit un peu abrité du vent, sinon j’ai du mal à savoir comment je vais pouvoir monter ma tente. Finalement, je trouve un campement au Mile 56,3 vers 17h00 qui est dans un vallon un peu abrité du vent et la pluie a réduit à un petit crachin assez fin. Je monte ma tente rapidement, fait un dernier pipi car je sais que je ne pourrai pas sortir de la tente avant demain matin. Ensuite, il faut absolument se mettre des vêtements secs pour arrêter d’avoir froid. Je mange des nouilles chinoises dans de l’eau froide (pas possible de se mettre dehors avec le réchaud) et je me force à manger des céréales car il faut pas mal d’énergie pour lutter contre le froid. La nuit va être dure je sens et je mets mes collants + ma polaire + 2 paires de chaussettes. Mes gants sont mouillés donc immettables. Demain ça ira mieux !
J4 (30 avril) : Mile 56,3 à 75,6
La nuit à été dure et je me réveille sous une bruine assez épaisse. Tout est mouillé et bien sûr mes vêtements de marche n’ont pas séchés. Je plie donc ma tente toute mouillée et remets mes vêtements humides… C’est dur, mais il ne faut pas traîner si je ne veux pas avoir froid. Je me mets donc en marche rapidement et mange une barre énergétique en route. Je fais un petit détour du PCT de 0,5 miles pour aller chercher de l’eau à un parking qui croise une route. Il y a moins de vent et les nuages s’élèvent un peu. Il y a même des toilettes avec du papier WC dedans ! J’en profite pour y faire un détour. 1 heure plus tard, la magie opère, je vois le chemin qui descend de manière vertigineuse au fond d’un Canyon et le ciel se déchire d’un coup. Le soleil brille à nouveau et c’est un tel bonheur difficile à décrire après ces moments assez difficiles. Toute la fatigue disparaît pour laisser place à une espèce de bonheur intense. Je dévale avec joie et légèreté la montagne. Je me surprends même à courir par moment. Alors bien sûr, qui dit descente dit remontée, c’est comme çà que ça marche le PCT. Mais je me sens à nouveau d’attaque et je repars sur les flancs de montagne tantôt montants, tantôt descendants. Je finis par arriver dans une plaine, redescendu à 1000 mètres d’altitude avec toujours du vent mais bien moins fort, et surtout un grand soleil. Je décide de bivouaquer ici au Mile 75,6. Je sors mes affaires trempées qui vont sécher en 5 minutes. Un vrai bonheur. Première nuit tout seul entouré de montagnes. Demain matin, je fais du stop sur la route située 2 miles plus bas pour me rendre à Julian pour un jour off bien mérité. Au programme, une chambre d’hôtel avec douche chaude, lessive et bonne bouffe (spécialités de tartes aux pommes). Le moral est à nouveau excellent.